En tant qu’observatrice du fonctionnement collectif, étatique et politique de notre pays et professeure à l’Université de Mons, Anne-Emmanuelle Bourgaux, qui travaille aussi à l’accessibilité et à la compréhension du système fédéral belge par le plus grand nombre, a mis en route un atelier hebdomadaire horizontal. But : observer avec ses étudiant·es les conséquences de la pandémie sur le respect de la Constitution (qui organise les pouvoirs et la relation entre ces pouvoirs et les citoyen·nes) et de la démocratie. La lecture de l’essai, La Société des vulnérables. Leçons féministes d’une crise, hautement recommandée par axelle pour son analyse limpide et transversale intégrant les questions d’écologie et les rapports Sud-Nord, lui a permis de faire la jonction entre différents pans de ses recherches.
Le genre du Covid, plus que sémantique
La querelle sémantique autour du genre du mot “Covid” – lancée par l’Académie française qui en préconise l’usage au féminin –, Anne-Emmanuelle Bourgaux la trouve révélatrice de la profonde ambivalence de cette période, scindée entre pôles “féminin” et “masculin” peu reliés entre eux.

Pôle féminin et invisibilisé : “la” Covid touche davantage les femmes. D’abord, elles sont majoritaires en première ligne dans les professions, essentielles mais dévalorisées, du care : métiers de contact, services et soins, mais aussi de contact avec les gens et donc avec la maladie. La juriste appelle ces femmes les “poilues” de la pandémie, en référence au surnom donné aux soldats de 1914-1918 envoyés dans les tranchées. Ensuite, la crise est terrible pour tous·tes, mais la population féminine souffre encore davantage de précarisation, ici et partout dans le monde : l’ONU chiffre à 47 millions les femmes jetées dans la pauvreté en raison du Covid-19, et l’UNICEF s’inquiète de l’aggravation de la pauvreté en Belgique, qui touche déjà un·e enfant sur 5 hors Covid. Et enfin, la crise sanitaire (re)confine les femmes au foyer, parfois lieu de violences, où toutes les causes de discriminations genrées restent présentes (tâches du care domestique : enfants, ménage, charges mentale et émotionnelle…), alors que le télétravail les désavantage plus que leurs homologues masculins.
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