“On se lève. On se casse.” Et on parle.

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Carte blanche
© ashley.adcox / Flick CC

Depuis quelques jours, cette puissante tribune de Virginie Despentes circule sur les réseaux sociaux et est reprise par de plus en plus de personnalités. On ne peut que s’en réjouir. Ce que nous refusons par contre, c’est que cette invitation soit utilisée à des fins personnelles et politiques par des personnes qui reproduisent elles-mêmes ce système de domination qui écrase les femmes et les réduit au silence.

La misogynie ne concerne malheureusement pas seulement le cinéma ou les sphères politiques, elle touche également le secteur associatif où l’on voit des hommes prendre la tête d’organisations par la force, y garder le pouvoir par l’humiliation, et réduire les femmes qui les composent au silence.

Nous parlons aujourd’hui en tant qu’anciennes ou actuelles bénévoles et travailleuses du milieu associatif au sein duquel nous nous sommes engagées avec passion. Nous avons malheureusement payé au prix fort cet engagement, à coup d’humiliation et de violences morales, au point, pour certaines d’entre nous, d’y abîmer notre santé et d’abandonner nos combats.

Moqueries, ordres avilissants, intimidations, décrédibilisations, agressivité empreinte de misogynie sont régulièrement excusés au nom de la cause que ces hommes prétendent défendre et des conditions de travail précaires.

On a vu quantité de personnes engagées, travailleuses ou bénévoles perdre leur envie de se mobiliser. On a vu des travailleurs déshumanisés, jetés à la première contestation.

Nous avons été nombreuses, tétanisées à l’idée de parler de ce qui nous arrivait ou des conséquences que cette parole pourrait engendrer.

Nous savons ces hommes protégés par de nombreuses personnes de pouvoir issues des milieux associatifs, politiques ou journalistiques. On nous a demandé de nous taire, hier et depuis des années, pour protéger ce combat que nous avons en commun. Il est temps d’arrêter de défendre l’indéfendable. Ces abus sont connus et ne devraient plus être tolérés.

Si les actrices ou femmes politiques jouissent d’un certain pouvoir, de par leur visibilité médiatique, nous restons invisibles en tant que travailleuses, militantes et bénévoles. Cette asymétrie qui réduit notre capacité de réaction participe à une complicité que nous souhaitons briser.

Au travers de ce texte, nous refusons fermement que ces hommes bénéficient d’une immunité parce que la structure dans laquelle ils évoluent ou notre combat en seraient affectés. Non, ce n’est pas parce qu’on travaille avec un public précaire et dans des conditions précaires que la maltraitance et la violence sont acceptables.

Ce qui nous rassure aujourd’hui, c’est que nous savons que nous ne sommes pas seules. Nous sommes chaque jour de plus en plus nombreuses à prendre conscience de la misogynie et de la violence dont ils font preuve. Avec le mouvement qui se lève en France et ailleurs, nous nous savons assez nombreuses et assez fortes pour dénoncer ces agissements.

Mais, nous avons également besoin de vous. A toutes celles et ceux qui ont fermé les yeux sur des agissements inacceptables pour soutenir une cause qui est juste, ouvrez-les avec nous. Ne soutenez
plus ce système de domination qui nous pousse à partir et qui nous maltraite. Parlez avec nous. Ne nous demandez plus de nous taire.

À tous ceux qui ont un pouvoir de décision, à tous les membres de Conseils d’Administration, d’Assemblées Générales, à tous les témoins de ces violences, choisissez la complexité de ne pas soutenir les dominants et d’être présents pour les victimes. Utilisez les organes de gouvernance pour exiger des changements. Exigez que ces personnalités toxiques pour nos combats fassent un pas de côté.

Cette semaine, nous nous sommes demandé, une fois de plus, comment osent-ils ?

Comment osent-t-ils relayer une carte blanche qui n’existe qu’en réaction à un système patriarcal dont ils sont parmi les principaux acteurs au sein du secteur associatif ?

De notre côté, c’est décidé. On parle. On espère vraiment que vous aussi.

Signataires : 

Alla Barsoukova, bénévole et collaboratrice cuisine de la Porte d’Ulysse (salariée) à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2017-2020)
Anissa Ghanem, bénévole et collaboratrice polyvalente (salariée) à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2018-2019)
Anne-Sophie Pochet, bénévole et collaboratrice polyvalente/logistique (salariée) à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2017-2019)
Céline Urbain, bénévole et coordinatrice de la Porte d’Ulysse (salariée) à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2017-2018)
Chloë Angé, coordinatrice générale et logistique à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2015)
Chiara Caferri, bénévole à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2015-2016)
Clara Alberti Villouta, bénévole et stagiaire à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2018-2019)
Clara Delacroix, bénévole et étudiante à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2017-2018)
Dolores Cerrato, hébergeuse, responsable association Récoltes solidaires 
Elodie Francart, fondatrice et porte-parole de la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2015)
Françoise Rommée, bénévole à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2015-2016)
Grace Lingi Koli, bénévole à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2017-2020)
Isabelle Kuypers, hébergeuse à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2017)
Lou Kacen, coordinatrice du dispatch famille à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2015)
Marguerite Bryssinck, bénévole et collaboratrice polyvalente (salariée) à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2017-2019)
Nadia Echadi, responsable de l’asbl Maxi-Liens, anciennement École Maximilien pôle enfants de la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2018)
Silvia Guarracino, bénévole et membre du C.A. à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2015-2018)
Sophie Fondu, bénévole et collaboratrice polyvalente (salariée) à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2017-2018)
Sophie Milquet, bénévole à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2018)
Stéphanie Wauthier, bénévole et collaboratrice polyvalente (salariée) à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2018-2019)
Ysaline Carlier, coordinatrice adjointe de la Porte d’Ulysse (salariée) à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2018-2019)
Yza de Burbure, bénévole et coordinatrice du pôle “Parole, écoute et soutien” à la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés (2017-2020)
Catherine Kestelyn
Lola Vandervliet, bénévole dans le milieu associatif et militante
Camille Druant, employée au Service Volontaire International (avril 2015 -octobre 2016)
Laura Goffart, conseillère Vert Ardent à Liège et ancienne coprésidente ecolo j, membre du Selflove gang (2017-2018)
Selflove gang, Groupe de Travail Féministe non-mixte d’écolo j
Sarah Degée, enseignante et militante féministe
Stéphane Vanden Eede, citoyen solidaire et allié.
William Donni
L’équipe de la Fédération des Centres Pluralistes de Planning Familial
Claire Hugon, alliée à la cause et féministe
Fatima Ben Moulay
Jean-Baptiste Dayez, psychologue social et allié de la cause féministe

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