Qu’est-ce qui vous enthousiasme actuellement ?
Les projets ! J’aime tout ce qui va de l’avant… Pour le moment, ce sont les livres de la rentrée pour les éditions Esperluète, le Marché du Livre de Mariemont, que je co-organise et qui se profile pour début octobre, et le travail à l’atelier, que j’essaie de préserver un maximum parce qu’une expo s’ouvrira aussi en octobre… J’aime le foisonnement ! J’ai beaucoup de mal avec la notion de limites, j’aime bien aller voir au-delà !
Quelque chose à pointer du doigt dans votre métier ?
C’est un métier exigeant, qui demande de l’attention, du soin, de la patience. Je crois que prendre le temps de faire bien les choses est essentiel dans mes métiers, que ce soit pour les éditions ou pour mon travail plastique. Le temps est quelque chose de précieux…
Un moment d’indignation : envers qui, envers quoi ?
Au moment où j’écris ces lignes, je ne peux que penser à ce qui se passe actuellement au Parc Maximilien, à l’accueil des réfugiés et plus largement à la manière dont on traite les inégalités dans notre pays, aux déficiences et à la faillite de notre système. J’ai honte de vivre dans un pays où une part du gouvernement relève de l’extrême droite. J’ai toujours été sensible aux questions des droits de l’homme et j’ai le sentiment que ce que je communique dans ma manière de faire mon métier exprime cela. Mais là j’ai l’impression que les mots ne vont plus suffire, qu’il faut passer à un autre type d’action. J’y réfléchis pas mal pour le moment, sans avoir encore de réponse…
Avec qui, avec quoi vous sentez-vous en lien ?
Avec des personnalités ou des artistes qui m’inspirent, qui nourrissent mon travail plastique. Ce sont des liens imaginaires mais forts et actifs. Ce qui fait que j’aime revoir régulièrement certaines œuvres, relire certains livres. Je pense à des artistes comme Bram Van Velde, Ellsworth Kelly mais aussi des contemporains… et des amis : Kikie Crêvecœur, qui est graveur, Alexandra Duprez ou Bernard Villers, qui sont peintres, et bien d’autres encore. Et pour les livres… Marguerite Yourcenar, Albert Camus, Michel Tournier, Marie Gevers, Marguerite Duras, mais aussi Jim Harrison ou Nicole Malinconi.
Je pense aussi à tous les liens entretenus par le travail, le fait de pouvoir travailler en équipe, de rencontrer des personnes qui ont chaque fois un univers… C’est varié, joyeux et surtout très riche !
Qu’est-ce qui titille votre curiosité ?
Fondamentalement, ce qui m’apprend quelque chose. Sur le monde, la nature, l’humanité… J’adore écouter la radio, les émissions historiques, scientifiques… J’aime écouter les gens, leurs histoires, leur parcours… Je me souviens de la définition de l’humanisme à la Renaissance telle que notre professeur d’histoire nous l’avait donnée : pouvoir embrasser la connaissance du monde. Cela m’avait fascinée et je crois que j’en rêve encore !
Anne Leloup se partage entre son métier d’éditrice et celui d’artiste, instaurant un dialogue sans cesse renouvelé entre les mots et les images. Les siennes, mais également celles d’autres plasticien·nes qu’elle contribue à faire connaître…
Diplômée en arts plastiques à l’Institut Saint-Luc de Bruxelles, elle pratique aussi bien la peinture que la gravure. Son geste graphique, libéré de toute contrainte, trace des formes étranges, de petits détails inspirés par la nature ou le quotidien. Ses œuvres singulières et fortes sont régulièrement exposées en Belgique et à l’étranger. À partir du 3 octobre, c’est la librairie-galerie Livre & Art de Louvain-la-Neuve qui accueille son travail.
Le métier d’éditrice s’est imposé peu à peu à Anne Leloup, forte de son bagage artistique et d’une formation en graphisme. En 1994, elle fonde la maison d’édition Esperluète qui publie des livres poétiques, beaux, à la mise en pages soignée. Chaque ouvrage est le fruit d’une rencontre entre un·e écrivain·e et un·e artiste. Le catalogue compte 150 auteur·es, dont les Belges Anne Brouillard, Corinne Hoex, Kikie Crêvecœur, Anne Herbauts, Eva Kavian, Caroline Lamarche, Nicole Malinconi… En mars 2017, Anne Leloup signe Trouvé par terre (notes d’atelier), dévoilant avec pudeur ses explorations plastiques, ponctuées de brefs commentaires. Elle co-organise aussi le Marché du Livre de Mariemont tous les deux ans. La 11e édition du « Salon de la petite édition et de la création littéraire » se déroulera du 6 au 8 octobre 2017.
Son site : http://anne-leloup.be