La scène avait de quoi susciter la curiosité. Dans une salle obscure où s’affichait une grande carte du monde, la présidente d’un pays pacifiste, la soixantaine, silhouette longiligne et chevelure blanche, débattait avec ses ministres – toutes des femmes – de la réponse à apporter face à la décision lourde de menaces prise par un autre État. Son pays devait-il recourir aux armes et rompre avec sa stratégie antimilitariste ? Autour de la table, les avis entre expertes divergeaient sur la manière d’éviter la catastrophe.
L’image de ce conseil de sécurité exclusivement féminin, une vision qui relève encore aujourd’hui de la science-fiction, avait été mise en scène au printemps 2018 par l’artiste israélienne Yael Bartana au théâtre Volksbühne de Berlin dans une pièce intitulée What If Women Ruled the World (“Que se passerait-il si les femmes dirigeaient le monde ?”). Même si nombre de critiques se sont agacé·es d’une mise en scène qui présentait le pouvoir féminin comme naturellement pacifiste, cette initiative a eu le mérite d’attirer l’attention sur une question qui taraude les féministes : à quoi ressemblerait un monde gouverné par les femmes ou, du moins, un monde où la parité serait atteinte ? La question reste d’autant plus d’actualité qu’un concept encore inconnu il y a une décennie connaît un succès croissant : la politique étrangère féministe.
Sous-représentées à la table des négociations
Initiée en 2014 par l’ex-ministre suédoise des Affaires étrangères, la sociale-démocrate Margot Wallström, cette nouvelle politique, détaillée par la Suède dans un manuel publié en 2018, commence à faire des émules en Europe et dans le monde…