C‘est une histoire qui commence il y a 4 ans par une discussion entre les narratrices, Ophélie Bouffil et Jeanne Nabulsi. Toutes deux se rendent compte qu’elles ont des cystites régulièrement et commencent à en parler – tout le temps. Les bouches se délient, les mains s’ouvrent, les récits sortent et résonnent. Combien d’ami·es, de cousin·es et de voisin·es font face à ces cystites récidivantes qui semblent revenir sans jamais réellement être soignées ? Elles décident alors d’organiser des ateliers de Cystité·es pour en parler. Une brèche s’ouvre…
L’épisode en chiffres
- 50 % des femmes* ont au moins une cystite dans leur vie.
- 30 % d’entre elles feront au moins une récidive.
- On aimerait bien avoir des chiffres sur le nombre de cystité·es aussi mais, tiens tiens… on n’en trouve pas.
Cet épisode s’accompagne d’un lexique, d’une Foire aux questions et de ressources complémentaires : continuez à scroller !
Avec, par ordre d’apparition :
Les Cystité·es, anonymes mais expert·es de leur vécu. Charline Marbaix, médecine généraliste et formatrice en promotion de la santé avec l’asbl PromosanteMG. Elle s’engage actuellement, à l’intersection des sciences sociales et médicales, pour une meilleure intégration de la dimension de genre dans les relations entre soignant·e·s et patient·e·s.
Dans les coulisses :
Réalisation : collectif Les Microsondes (Ophélie Bouffil et Jeanne Nabulsi) avec les participant·es aux ateliers « Cystite et Podcast ». Prise de son & écriture : Les Microsondes. Montage : Thibaud Rie et Les Microsondes. Sound design : Thibaud Rie. Mixage : Roxane Brunet. Musique : Chanteurs/euses : Aurore Latour, Thelma Cassé, Jeanne Vancoppenolle, Manon Scuttenaire, Caïus Ndikumana, Ophélie Friberg et Olivier Mahiant. Sous la direction de : Ophélie Friberg et Olivier Mahiant, artistes, animatrice et animateur de circle singing (technique de chant improvisé). Ingénieur son : Pierre-Nicolas Blandin. Illustration : Marie Aynaud, artiste colleuse. Typographie et graphisme : Florian Mahieu. Avec le soutien du Fonds d’aide à la création radiophonique (FACR) de la Fédération Wallonie-Bruxelles et d’Un Futur pour la Culture.
« Cystite Partout, » est une production d’axelle magazine/Vie Féminine (regard éditorial : Sabine Panet), en coproduction avec Les Terres Arables, réalisée avec le soutien du FACR et de Un Futur Pour la Culture (Fédération Wallonie-Bruxelles).
Remerciements très particuliers à : Sève, Flavien, Véronique Lemaire, Lorraine, Alexandre, Lucien, Mathilde pour leurs oreilles, leur soutien et leurs conseils. Merci à Tom Wise et son Gardening Studio pour les urgences voix de dernière minute, Mel et Emma de l’asbl Waka-Up pour leur soutien précieux dans l’organisation des ateliers. Merci aux artistes qui ont mené des activités lors des ateliers Cystite et Podcasts : Leïla Chaarani, Mélia de Huez, Jeanne Garbasi, Valérie Maione. Et merci à l’asbl Toestand et le Mona pour leur accueil.
Écoutez Cystite Partout, sur Ausha, Apple Podcasts, Spotify, Deezer, Soundcloud, Podcast Addict, Amazon Music, Google Podcasts, Overcast…
Découvrez les coulisses du documentaire sur la page Instagram de Les Microsondes !
Lexique, Foire aux questions et ressources complémentaires de l’épisode
Petit lexique de l’épisode
Infections urinaires : Toutes les infections situées dans les voies urinaires. Une infection implique que des micro-organismes (comme des bactéries ou des virus) s’introduisent ou prolifèrent dans des endroits du corps où leur présence cause des dommages.
Inflammation : L’inflammation est un processus d’autodéfense du corps lui-même. Mais si elle est trop forte, elle peut abîmer les organes. Quant aux inflammations chroniques, ce sont des réponses répétitives à des changements dans l’environnement intérieur et extérieur du corps.
Cystite : Techniquement, la cystite est une inflammation de la vessie (dès que vous entendez -ite à la fin d’un mot, vous pouvez deviner qu’il s’agit d’un type d’inflammation). Elle diffère donc de l' »urétrite », qui est une inflammation de l’urètre, ou encore des inflammations de l’uretère.
Urètre : Il s’agit du petit tuyau qui évacue l’urine depuis la vessie vers… la cuvette ? Un pisse-debout ? La voiture de votre patron ? La mousse d’un joli tronc d’arbre en forêt de Soigne ?
Uretère : Canal moins connu que sa sœur l’urètre, ayant pourtant tout autant de mérite. Sans lui, les reins ne seraient pas reliés à la vessie !
Cystite récidivante : Eh bien nous voici au cœur du sujet de cette série. Puisque ce sont les cystites qui reviennent minimum quatre fois par an, et parfois bien plus. Il existe aussi les cystites compliquées : ce sont celles qui montent aux reins (pyélonéphrite) ou qui se propagent dans le sang (septicémie). Ces dernières peuvent être mortelles si elles ne sont pas correctement soignées.
Cystité·e : C’est là un terme inventé par les réalisatrices (instant promo : elles ont d’ailleurs réalisé une série de capsules radiophoniques sur les langues et les néologismes à Bruxelles appelée « Brusselsspeaks : Word Soss »).Il désigne sans distinction de genre les personnes qui ont une vulve et qui souffrent de cystites récidivantes.
Escherichia colis (E-coli) : La bactérie responsable de l’immense majorité des cystites. Même s’il en existe d’autres. Par exemple : Klebsiella pneumoniae, Staphylococcus saprophyticus… à vos souhaits.
Physiopathologie : Charline Marbaix, qui a étudié la médecine, utilise ce terme comme si elle parlait d’une tarte à la courgette. Or nous sommes plus nombreux/ses à savoir ce qu’est une tarte à la courgette. Même si on ne sait pas forcément la cuisiner, mais là, on s’éloigne… La physiopathologie, c’est une branche de la biologie qui se penche sur les causes et les conséquences des dérèglements au sein des organismes. Donc grosso modo, n’ayons pas peur de nous approprier les termes savants : cette discipline traite… des maladies en général !
Pathogène : On a toutes et tous des bactéries qui nous composent, qui sont logées dans nos intestins, notre vessie, notre vagin, par exemple. Mais toutes ces bactéries ne sont pas forcément là pour nous faire du mal, certaines nous font même du bien ! On parle de « bactéries pathogènes » lorsqu’elles deviennent responsables d’une inflammation, et là, OK on a le droit de les détester.
Système uro-génital : Appareils urinaire et génital réunis. En effet, tous ces organes se côtoient intimement. On pourrait voir ça comme un immeuble dont les murs en carton supposent un voisinage dans lequel il vaut mieux prévoir des réunions régulières si on veut bien s’entendre !
Souche de bactérie : Voilà Charline encore avec ses tartes à la courgette ! On parle de souche pour désigner un sous-type de bactérie ou de virus. Donc une souche de E-coli est un sous-type de E-coli, qui elle-même est un type de bactérie. Ces souches portent des noms à dormir debout, on fera sans si ça vous va ?
Lactobacilles : Ces bactéries se trouvent dans nos intestins, nos voies orales et uro-génitales. Elles protègent la vessie d’invasion et de prolifération excessive d’autres bactéries en acidifiant le milieu. En fait, elles fermentent les sucres en acides lactiques. Si vous vous demandez maintenant ce qu’est un acide lactique, c’est que votre curiosité est piquée : mission accomplie en ce qui nous concerne. Il va maintenant vous falloir répondre à votre désir de connaissance et vous rendre dans les bibliothèques des internets.
Microbiote : C’est l’ensemble des micro-organismes (donc les bactéries, les champignons et minuscules petites bêtes) qui habitent un microbiome. Qu’est-ce qu’un microbiome, vous demandez-vous maintenant (la sueur au front devant ce nouveau mystère) ? Eh bien il y a pas mal de discussions entre les scientifiques sur la définition exacte, alors on va vulgariser sans pincettes, si vous voulez bien : disons que le microbiome est la maison du microbiote, donc les conditions écologiques du milieu. On parle aussi de flore… nous, on aime bien imaginer qu’il s’agit de la flore et de la faune !
Urobiome : L’urobiome (découvert il y a seulement une dizaine d’années !) est le microbiome des voies urinaires. La flore des voies urinaires, et sa faune !)
Société phallocentrée : La nôtre, selon Charline Marbaix dans cet épisode. Le « phallocentrisme » désigne une attitude ou une idéologie qui accorde une importance centrale au phallus, symboliquement associé à la masculinité, et qui considère cette symbolique comme représentative de toute l’humanité, mettant ainsi en avant la domination patriarcale dans les systèmes de pensée, de société…ou dans nos sexualités.
Rapport sexuel : Non, on rigole. Mais comme le dit Charline, la pénétration n’est pas l’unique rapport sexuel (le cunnilingus par exemple peut-être un super rapport sexuel pour les adeptes).
FAQ de l’épisode
Nous ne sommes évidemment pas médecines. Cependant, voici quelques informations supplémentaires tirées de notre propre expérience, nos lectures, ou encore des expériences des Cystité·es rencontrées dans le cadre de ce podcast, qui pourraient répondre aux questions que cet épisode aurait pu soulever. En cas de doute ou pour obtenir des précisions, nous vous recommandons de consulter des sources fiables, de prendre contact avec des professionnel·les de santé et de vous fier à votre propre vécu avec la cystite. Vous trouverez également, à la fin de cette rubrique et des FAQ des autres épisodes de la série, des ressources complémentaires qui pourraient vous intéresser.
En bref, c’est quoi une cystite ?
Dans le langage courant, le terme « cystite » est souvent utilisé comme synonyme d’infection urinaire. Cependant, le mot cystite vient du radical « cyst- » (qui signifie « vessie ») et du suffixe « -ite », qui désigne une inflammation en médecine. Ainsi, la cystite désigne spécifiquement une inflammation de la vessie. Bien que la majorité des cystites soient causées par des infections urinaires, ce n’est pas toujours le cas. D’ailleurs, parler d' »infection urinaire » n’est pas tout à fait exact, car ce ne sont pas les urines infectées qui provoquent les symptômes, mais plutôt l’agression de la paroi de la vessie par des bactéries pathogènes.
Quelles sont les différentes formes de cystites ?
Cystites aiguës : Très souvent la cystite aiguë, chez les femmes et les personnes avec une vulve, est d’origine bactérienne, principalement due à des bactéries comme Escherichia coli (E. coli). Les douleurs associées sont souvent très intenses : certaines personnes décrivent une sensation de « lames de rasoir » ou de « coups de poignard » ressenties lors de la miction. D’après Leslie Delcarte, urologue interviewée dans le cadre de ce podcast : parmi les symptômes, il y a (entre autres) l’apparition de douleur au moment d’uriner (une « mictalgie »), le besoin fréquent d’uriner (une « pollakiurie ») et généralement, on se lève la nuit pour aller faire pipi (une « nycturie »).
Cystites simples : Il s’agit de cystites causées par des germes, qui apparaissent chez des femmes et personnes avec vulve sans facteurs de risque, de manière ponctuelle et parfois espacées de plusieurs années. Ce sont les cystites aiguës classiques.
Cystites à risque de complications : Elles surviennent chez des femmes et personnes avec une vulve présentant des caractéristiques particulières, comme celles qui sont enceintes, ou diabétiques, ou âgées de plus de 65 ans.
Cystites récidivantes : Ce type concerne des femmes et personnes avec une vulve ayant au moins quatre épisodes de cystite par an.
Cystites compliquées : Elles se manifestent par des symptômes plus graves, comme de la fièvre, des frissons et des douleurs lombaires, indiquant souvent une infection des reins, appelée pyélonéphrite.
Cystites interstitielles : Il existe également des cystites non infectieuses, appelées « cystites interstitielles » jusqu’à récemment. On parle aussi de « syndrome de la vessie douloureuse ». Ce syndrome englobe toutes les affections non infectieuses qui provoquent des symptômes gênants au niveau de la vessie, de l’urètre, de l’abdomen, voire du vagin, avec des envies fréquentes d’uriner (jusqu’à 60 fois par jour !) et parfois de l’incontinence. L’origine de ces cystites reste floue, mais elles se caractérisent par une inflammation de la paroi vésicale et une hypersensibilité nerveuse.
Il existe également des cystites d’origine somatique, c’est-à-dire liées à des facteurs psychologiques comme le stress ou des traumatismes. Ces cystites n’ont pas toujours une explication physiologique évidente, et il reste encore beaucoup à explorer concernant l’influence du psychisme sur le corps. Cette interaction entre les pensées et le corps, souvent méconnue, mérite d’être davantage partagée et étudiée. Si le sujet vous intéresse, nous vous recommandons d’écouter l’épisode 4 de la série : Nos territoires.
Est-ce qu’une urétrite est une cystite ?
Les urétrites, qui sont des inflammations de l’urètre (le petit conduit permettant l’évacuation de l’urine de la vessie vers la vulve) et sont un peu comme les cousines des cystites (décidément iels sont sympas dans la famille…). Elles présentent des symptômes similaires à ceux de la cystite, bien que la vessie ne soit ni enflammée ni infectée par des microbes. Souvent, les urétrites sont liées à une infection sexuellement transmissible (IST). Elles peuvent aussi survenir après un traumatisme local, l’insertion d’un objet dans l’urètre, par exemple. La distinction avec la cystite est parfois difficile à faire, même si les douleurs au niveau de la vessie sont généralement absentes dans le cas des urétrites. Le diagnostic repose souvent sur un examen bactériologique pour détecter une éventuelle IST.
Pourquoi les infections urinaires surviennent-elles parfois après les rapports sexuels ?
L’une des raisons les plus connues est que les rapports sexuels favorisent la migration des bactéries via le tractus urinaire, notamment chez les personnes ayant une vulve, en raison de la proximité entre l’anus et l’urètre. Les frottements (que ce soit vulve contre vulve ou lors de la pénétration) facilitent cette migration. Mais d’autres facteurs peuvent également entrer en jeu, comme des raisons anatomiques (urètre trop proche de l’anus ou trop large), la sécheresse vaginale, un déséquilibre de la flore vaginale, un manque d’excitation ou de lubrification pendant les rapports, ou parfois un lien avec des traumatismes passés, etc…
Lors des ateliers « Cystite et Podcast », voici quelques expériences échangées entre Cystité·es qui ont permis, pour certaines personnes, de diminuer le risque de cystites après les rapports :
- Utiliser de l’huile de coco comme lubrifiant (attention, elle n’est pas compatible avec les préservatifs en latex, car elle peut les rendre poreux et inefficaces pendant la pénétration)
- Uriner juste après avoir eu des rapports sexuels
- Aller consulter un·e kiné
- Ou encore, opter pour des rapports non-pénétratifs
Mais évidemment, à chacun·e sa cystite et son chemin de soin, et chaque cas est unique !
Les hommes et les personnes avec un pénis peuvent-elles avoir des cystites ?
Les spécialistes de la santé ne sont pas tous d’accord sur la question de l’emploi du terme cystite chez les hommes et les personnes ayant un pénis. Certain·es parlent de cas rares, voire exceptionnels, tandis que d’autres considèrent carrément que le terme « cystite » est inapproprié dans ce contexte. En effet, la cystite est plus courante chez les femmes et les personnes avec une vulve, en grande partie à cause de la proximité entre l’anus et l’urètre, qui facilite le passage des germes. Chez les hommes et les personnes avec un pénis, admettons qu’ils réussissent à atteindre l’urètre, ils devraient encore remonter sur plusieurs dizaines de centimètre avant d’atteindre la vessie. Et pour y parvenir, les microbes doivent être particulièrement résistants, ce qui reste exceptionnel.
Les rares germes qui réussissent à s’installer dans l’urètre ne sont généralement pas les mêmes que ceux responsables des cystites, comme E.coli. Au lieu de cela, ce sont souvent des agents infectieux des maladies sexuellement transmissibles qui sont en cause, tels que Chlamydia, Gonocoques, Trichomonas vaginalis, ou Mycoplasma genitalium, qui causent des infections tout aussi problématiques. Un autre facteur de risque est la prostate, qui peut commencer à grossir à partir de la cinquantaine, créant un obstacle dans les voies urinaires. Enfin, les hommes ayant une sonde urinaire à cause d’une intervention ou d’un problème médical sont plus exposés à ces infections.
Selon l’urologue Leslie Delcarte, une infection urinaire chez un homme ou une personne avec un pénis ne peut pas être qualifiée de cystite simple. Elle préfère parler de « cysto-prostatites » car l’inflammation de la prostate, un organe uniquement présent chez les hommes et les personnes avec un pénis, entre souvent en jeu. Les symptômes incluent des douleurs en urinant, des douleurs dans le bas du dos, dans l’anus ou entre les testicules, des troubles urinaires, de la fièvre, etc. Il est néanmoins crucial de consulter rapidement un·e médecin·e dès l’apparition de ces signes, et un bilan chez un·e urologue est indispensable pour un diagnostic et un traitement adaptés.
Ressources de l’épisode
La Cystite, le cauchemar féminin, Rica Etienne et Dr. Jean-Marc Bohbot, Flammarion 2021.
Miction Impossible, Corinne Isnard-Bagnis, Éditions du Rocher 2020.
Maladies infectieuses et tropicales, ECN Pilly, Alinea Plus 2016.
Infections urinaires aiguës chez les femmes, Infos-Patients Prescrire.
« The urobiome in men and women : a clinical review », Romain S Roth, Mia Liden, Angela Huttner, Clin Microbiol Infect. 2023.
« Microbiote urinaire et troubles mictionnels », G. Amarenco, Progrès en urologie 2015.
« Cystite, colique néphrétique, infection urinaire : idées reçues et conseils », France inter, 2020.
