Elena Ferrante : L’enfant perdue

C’est toujours Elena, diminutif Lenù, qui raconte d’une écriture fluide, presque plate, les événements heureux ou cruels jalonnant sa vie de femme, mère, épouse, amante, au prisme constant de son amitié/amour/rejet pour la fascinante Lila.

Le quatrième et dernier tome de la série L’amie prodigieuse trouve dans L’enfant perdue, décrivant l’âge de la maturité, une issue (presque) douce et une apothéose à toutes les incertitudes qui traversent l’histoire d’une soixantaine d’années d’amitié tendue entre Lenù et Lila. Comment se construire par rapport à l’autre que l’on admire, en opposition, en comparaison, mais jamais complètement détachée ? Complément au mystère : le nom de l’auteure, Elena Ferrante, est un pseudonyme. Personne ne sait qui se cache derrière.

Il faudra commencer par le premier tome pour comprendre le quartier, la ville de Naples, ses familles pauvres, conflictuelles, sexistes, les Cerullo, les Carracci, Solara, Spagnuolo, Sarratore…, toile de fond principale sur laquelle on se perd parfois, entre mères folles, autoritaires ou effacées, filles qui ne s’en sortent pas, frères violents ou ravagés, pris dans le tourbillon des mariages, séparations, trafics, combats communistes ou Brigades rouges.

La tétralogie reste toujours ancrée dans un quotidien, extraordinaire et banal. Elle explore les barrières de classe et les barrières sexistes, concrètes et internes, auxquelles les femmes doivent faire face et revient sans cesse, c’est peut-être son point le plus féministe, sur les oscillations d’Elena quant à la perception de sa propre vie. Les photos d’une adaptation du premier tome en série télévisée viennent de sortir. À noter aussi, la publication en livre audio du roman Poupée volée, lu par Ivana Coppola, à écouter pendant les longues soirées d’été. (V.L.)

 

Elena Ferrante, L’enfant perdue, Gallimard 2018, 560 p., 23,50 eur. Les autres titres de la série sont disponibles en Folio (environ 8 eur.). Poupée volée, Gallimard 2018, 4h30 d’écoute, 22 eur.