Que préparez-vous en vue de ce 8 mars ?
“Il s’agira d’un 8 mars un peu spécial, de résistance. Car les crises s’accumulent et les femmes sont en première ligne, notamment de la crise énergétique. Cela raconte quelque chose de notre monde qui est géré par l’économie, le capitalisme et la spéculation. Ce 8 mars, nous n’allons pas nous taire face à la précarisation galopante des femmes. Un très grand nombre de droits différents seront mis en avant dans toutes les régions de Belgique francophone, avec des spécificités locales. Des actions seront organisées : certaines femmes vont faire grève, il y aura des conférences, des ateliers, des expositions et des rassemblements.”
On sortira difficilement du patriarcat sans sortir également des logiques capitalistes.
Qu’est-ce qui vous préoccupe actuellement sur le plan des droits des femmes ?
“Les sujets ne manquent jamais. En ce moment, on peut épingler deux actualités : le statut de cohabitant·e et la pension. Ces deux dossiers sont trop peu souvent analysés d’un point de vue genré, pourtant ces décisions politiques affectent les femmes. Nous demandons (avec d’autres) la suppression du statut de cohabitant·e. Du côté de la pension, la récente réforme prévoit l’assimilation des congés de maternité et d’allaitement dans le calcul de la pension… mais pas des congés parentaux ! Ce sont pourtant souvent les femmes qui vont prendre congé pour s’occuper des enfants, c’est-à-dire qu’elles pallient le manque de l’État en termes de places d’accueil, et cela n’est pas sans conséquence : 70 % des personnes en situation de pauvreté individuelle sont des femmes. On comprend comment le néolibéralisme organise la dépendance des femmes, et se base sur leur travail gratuit. On sortira difficilement du patriarcat sans sortir également des logiques capitalistes. Prenons la question du tarif social élargi depuis le début de la crise énergétique qui a amorti le prix de l’énergie et qui va disparaître. Pour les femmes, cela va être encore plus compliqué – alors que certaines venaient déjà pour se chauffer dans les locaux de Vie Féminine ! Nous n’allons pas oublier non plus les élections de 2024 qui arrivent et qui charrient de nombreux enjeux. Nous souhaitons faire en sorte que l’avis des femmes compte. La dimension politique de l’éducation permanente, c’est aussi faire en sorte que les femmes s’emparent de ces sujets.”
Comment faire ?
“Nous allons organiser des formations et des ateliers de “réappropriation” sur ces questions. Par exemple, le prix du gaz n’est pas d’abord dû à la guerre en Ukraine ! Il est dû aux spéculateurs qui s’enrichissent à l’occasion de cette guerre. Le gaz est revendu plusieurs fois avant d’arriver dans nos foyers. Ce sont des choix politiques, ce n’est pas une fatalité. Se former et réfléchir ensemble est un bon levier, parce qu’avec les informations et les échanges viennent souvent l’indignation et l’envie d’enrayer cette machine. Nous continuerons aussi à porter les voix et les réalités des femmes au sein des instances politiques et de l’espace public au sens large, des endroits auxquels elles accèdent peu. Ce qui reste important pour nous, c’est de mettre la lumière sur les femmes qui ne font pas grève, qui ne manifestent pas, qui restent encore très invisibles. C’est cette solidarité-là, politique, entre femmes, qui fera bouger le monde.
C’est cette solidarité-là, politique, entre femmes, qui fera bouger le monde.
Enfin, en octobre, nous organiserons un grand congrès. Nous nous baserons sur des consultations collectives auprès des femmes elles-mêmes, bien sûr, qu’elles soient actives depuis 70 ans au sein du mouvement, ou depuis une heure. Des propositions vont en sortir, qui seront remises en discussion lors d’assemblées régionales, en vue de ce congrès. L’idée est de se renforcer sur notre identité commune et sur la manière de la vivre. Pour faire advenir le monde qu’on veut…”