3 questions à Marcia Burnier

Marcia Burnier © Sarah Benichou

À 33 ans, l’autrice du premier roman Les Orageuses est écrivaine, assistante sociale dans un planning familial de la région parisienne et grande amoureuse des chiens et des loups. (Propos recueillis par Sarah Benichou)

C’est ton premier roman, comment t’es-tu décidée à l’écrire ?

“J’étais frustrée que mes histoires, et les histoires de mes copines, n’apparaissent jamais dans la littérature. Et puis, une amie m’a dit : “Il ne tient qu’à toi de les écrire !” Et voilà, j’ai écrit une histoire d’anti-héroïnes, parce qu’on ne nous voit jamais dans les livres.”

Tu lis beaucoup, qui t’inspire ?

“En français, Lola Lafon. Tous ses romans ont beaucoup compté pour moi. Et sinon, Dorothy Allison, une lesbienne américaine, de classe populaire. Elle écrit des histoires de femmes, de très belles amitiés féminines. Elle parle de sentiments très complexes de manière très accessible, notamment ceux qui l’ont traversée dans l’inceste qu’elle a vécu. Son écriture est extrêmement fine, mais sans une once d’élitisme.”

Justement, l’amitié entre femmes est au cœur de ton roman : pourquoi était-il si important de parler de ça ? 

“Ma vie est pleine de femmes et la littérature est vide de nous. Il n’y a pas de récit d’amitiés fortes. Ou alors ce sont des binômes, et même eux sont rares. Je voulais parler des femmes, en les faisant discuter entre elles d’autre chose que des hommes avec qui elles relationnent. Ces liens ont été source de guérison pour moi. Mes amitiés forment comme une famille.”

Cambourakis 2020, 150 p., 15 eur.

Les Orageuses, un éclair de sororité : chronique

“Sorcières mes sœurs, ces vengeresses, pétroleuses, prêtresses, toutes un peu abîmées mais qui ont réussi à se rafistoler comme elles pouvaient.” Mia regarde Inès, Léo, Lila, Louise et Nina avec son cœur. Lucie, elle, casse des abribus en manif et s’est toujours méfiée des filles. Au début, Mia la rencontre dans un bar et lui envoie des textos. Nous, on s’engouffre dans le tourbillon de cette bande de meufs qui ont entrepris d’exiger des réparations pour les dommages que les hommes leur ont causés. L’éclat de leurs rires fuse au milieu de nos larmes : nous sommes vivantes, avec elles. On acquiesce tendrement, on sourit, on tremble, on a le souffle court. Elles ont peur autant que nous, elles doutent, elles tombent amoureuses, elles ne maîtrisent pas grand-chose et elles sont toutes différentes. Elles ont juste besoin les unes des autres : c’est la sororité qu’elles bâtissent qui les soigne. Il y a du Despentes des années 1990 et 2000 dans ce premier roman de Marcia Burnier qui doit vraiment passer entre toutes nos mains. (S.B.)