Une conversation avec Marianne Berenhaut

Marianne Berenhaut. Conversation avec Nadine Plateau, Éditions Tandem 2018, 120 p., 14 eur.

En plus d’être un bel objet, ce livre éclaire le parcours de Marianne Berenhaut, sculptrice belge née en 1934 dont la reconnaissance sociale n’est malheureusement pas à la hauteur de son talent. En un peu plus de cent pages, l’ouvrage reprend la conversation – c’est le principe de cette collection des Éditions Tandem – entre l’artiste et Nadine Plateau, militante féministe belge.

Les deux femmes se connaissent depuis les années 1960 et sans doute leur complicité contribue-t-elle à rendre l’échange passionnant. Marianne Berenhaut s’est mise à la sculpture, car son métier d’infirmière ne la satisfaisait plus entièrement : “Il y avait là quelque chose d’une nécessité par rapport à ce manque que je ressentais dans ma vie, en particulier dans ma vie professionnelle. La sculpture remplissait une fonction importante et c’est toujours vrai aujourd’hui.”

Au fil des chapitres qui abordent chronologiquement les étapes majeures de la carrière de l’artiste, il est beaucoup question de son langage plastique si singulier. Depuis sa période des “Poupées poubelles”, la sculptrice récupère des objets du quotidien pour les assembler, les mettre en résonance. “Les matériaux, je les démembre peu, je les change peu. En réalité, je ne transforme presque jamais les objets, je les dispose…”

Cet entretien évoque également d’autres aspects de la vie de Marianne Berenhaut : une enfance marquée par la Shoah (elle a perdu ses parents et un frère à Auschwitz) ; son insatiable désir de liberté et aussi son rapport au féminisme.  “Je n’avais pas, en réalisant les poupées, une intention féministe, une volonté de lutte. Pourtant je suis féministe, je le dis, féministe affectivement et sentimentalement mais je n’ai jamais été une militante…” Des réponses directes, sincères qui aident à décrypter le processus créatif de cette artiste dont l’œuvre bouscule repères et certitudes. (Stéphanie Dambroise)