Rencontre avec Sherin Khankan, la première femme imame du Danemark

Par N°253 / p. 46-48 • Juillet-août 2023 | conectionconection Contenu complet (pdf)
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L’été dernier, nous avons rencontré Sherin Khankan, première femme imame du Danemark, dans la mosquée féministe qu’elle a cofondée à Copenhague en 2015, The Mariam Mosque. Elle nous a parlé de la genèse de son engagement et de son travail pour l’égalité.

Sherin Khankan en 2016. © Linda Kastrup / Scanpix Denmark / AFP

Nous avons rendez-vous à la Mariam Mosque (“la mosquée Mariam”), une mosquée féministe en plein centre de la capitale danoise. Loin des grands minarets de notre imaginaire collectif, l’espace se situe dans un immeuble traditionnel. Nous arrivons dans une salle lumineuse aux murs écrus et à l’ambiance chaleureuse. Face à nous, des femmes et des hommes assis·es à la même table, travaillant ensemble. Peintures et calligraphies habillent les murs, dont un portrait de Marie – Mariam en arabe – qui, nous l’apprendrons plus tard, lui fut offert à Bruxelles. Des tapis aux tons rouges couvrent le sol. Nous enlevons nos chaussures, comme il est coutume de le faire. Nous sommes accueillies par Sherin Khankan, première imame du Danemark et de la Scandinavie et cofondatrice de la Mariam Mosque ; par Stefanie Vester Kelani, membre du conseil d’administration et apprentie imame ; et par Jonas Mirza, un bénévole et membre actif de la mosquée.

Rendre aux femmes leur place dans l’Islam

Retour en arrière. Damas, 1999. Sherin Khankan a quitté son Danemark natal pour étudier en Syrie. Elle commence à nourrir une réflexion autour de la place des femmes musulmanes alors qu’elle réalise un mémoire sur le soufisme et l’activisme islamique dans la mosquée Abu Nour, l’un des plus grands centres de l’activisme islamique sunnite en Syrie. Tous les vendredis, elle se rend au prêche du grand Mufti de Syrie (le plus haut représentant musulman sunnite officiellement nommé de l’administration du pays), Sheikh Ahmad Kaftaro. “Je me demandais pourquoi nous n’avions pas d’imames femmes, pourquoi nous étions moins visibles et relayées aux balcons pendant que les hommes étaient au premier étage à la mosquée. Je me trouvais au milieu de femmes remarquables, dotées d’un grand savoir. Pourquoi n’étaient-elles pas avec les hommes ? Pouvaient-elles s’imaginer un jour devenir imame ou Mufti ?”, nous raconte-t-elle, 23 ans plus tard, en anglais.

Je me demandais pourquoi nous n’avions pas d’imames femmes, pourquoi nous étions moins visibles et relayées aux balcons pendant que les hommes étaient au premier étage à la mosquée.

À son retour, elle lance la première organisation de leaders et intellectuel·les musulman·es à être dirigée par une femme au Danemark, “Critical Muslims”. “J’avais besoin de créer un espace de leadership musulman féminin et aussi une communauté d’hommes et de femmes musulman·es avec une interprétation différente de l’Islam, avec une approche plus orientée vers le soufisme [une dimension intérieure spirituelle de l’Islam, ndlr] et le féminisme.” Avec Critical Muslims, elle rédige un manifeste publié quelques années plus tard dans le média danois Politiken. Les prémices de la Mariam Mosque y sont esquissées : un safe space pour les femmes musulmanes organisé par des femmes imames.

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