
Qu’est-ce qui vous enthousiasme actuellement ?
L’idée que, durant l’été, mes amies slameuses et amis slameurs se ressourcent, profitent de la trêve estivale et de la raréfaction des scènes ouvertes pour écrire et préparer de nouveaux textes pour la rentrée. J’aime m’imaginer reliée à toutes ces âmes en création, à l’expérience commune du ralentissement et à la joie des retrouvailles.

Quelque chose à pointer du doigt dans votre métier ?
Aujourd’hui, l’obtention du fameux “statut” d’artiste est un parcours du combattant semé d’embûches indicibles. La famille perd des membres chaque jour, impuissante à protéger et retenir les sien·nes. À quoi cela sert-il de tellement batailler pour entrer dans les cases administratives de l’intermittence du spectacle si, au final, nous restons considéré·es comme des sous-travailleurs ? La précarité sur le long terme est intenable.

Un moment d’indignation : envers qui, envers quoi ?
L’obligation, il y a quelques semaines, de devoir, avec mes amies poétesses, nous justifier quant à nos choix artistiques, comme si nous perdions nos âmes en nous professionnalisant, comme si nous déforcions le “mouvement” slam en nous ouvrant à d’autres champs, comme si nous étions programmées, non pas pour nos talents de poétesses, mais parce que nous sommes des femmes. Grosse colère lorsque les reproches ne sont adressés qu’aux initiatives portées par des femmes.

Avec qui, avec quoi vous sentez-vous en lien ?
Je me sens en lien avec toutes les personnes qui font ce qu’elles peuvent, qui rêvent mais surtout agissent, au quotidien, piano, piano, humblement, pour une société plus solidaire. J’aime quand ça part du quartier, du foyer, du vieux meuble de famille qu’on change de place. Je me sens en lien avec toutes les personnes capables d’indignation, de sensibilité, d’empathie. Je me sens en lien avec la nature, sa fragilité, sa beauté dans le ténu, sa rudesse et son côté implacable aussi.

Qu’est-ce qui titille votre curiosité ?
Le monde de la danse ouvert à tous les corps, la mise en mouvement de ces corps dits hors normes pour ces lieux scéniques, la recherche de souplesse à travers le temps, ma part d’enfant-qui-ne-tient-pas-en-place perdue entre mon canapé et ma voiture.
Romaniste, diplômée en médiation, Lisette Lombé a travaillé durant une dizaine d’années en tant qu’enseignante et jobcoach, avant de se consacrer à des projets socio-artistiques. Artiste pluridisciplinaire, Lisette crée des objets poétiques (textes, performances, installations) qui nous font voyager entre l’Europe et l’Afrique. Elle écrit pour des magazines féminins, donne des conférences, programme des événements culturels et expose régulièrement ses collages.
Lisette partage également son amour de la poésie en animant des ateliers d’écriture et de confiance en soi, qui l’ont conduite de la Belgique à l’Irak, en passant par le Congo, le Sénégal et le Rwanda. Elle est l’auteure de deux livres : Black Words et La magie du burn-out.
Membre fondatrice du Collectif L-SLAM, elle a obtenu, en 2015, une seconde place au Prix Paroles Urbaines, en catégorie slam. L-SLAM est un collectif de poétesses, multiculturel et intergénérationnel, qui organise des ateliers et des podiums de slam selon le principe du marrainage. Des artistes confirmées accompagnent d’autres femmes dans l’écriture de textes et soutiennent ces dernières pour leur première montée sur scène.
En 2017, la Ville de Liège lui a décerné le titre de Citoyenne d’Honneur pour l’ensemble de son travail.
En 2019, elle publie avec sa sœur, Julie Lombé (prix Paroles Urbaines 2019), un recueil de textes issus des ateliers du collectif L-SLAM, intitulé On ne s’excuse de rien.